La Chronique : Arafat parti, le Coupé-décalé enterré ?

C’était un lundi. Comme aujourd'hui. Un 12 août. Comme aujourd'hui aussi. Drôle de coïncidence ? En tous les cas, cela fait exactement 5 ans, jour pour jour, depuis le lundi tragique du 12 août 2019 qu’Arafat, roi du Coupé-décalé et idole de toute une jeunesse, s’en est allé dans le ventre de la nuit.
Sans jeu de mots macabres, c’est en effet en pleine nuit que ce grand fan de moto a trouvé la mort, sur son engin à Angré, en percutant une voiture. Un sacré coup de massue sur la tête de ses fans, pris de court par la nouvelle au petit matin, quand celle-ci se confirme.
Au moment où les proches de l’artiste honorent sa mémoire, 5 ans après, l’on pourrait aussi se demander où en est aujourd'hui cette musique dont il était l’un des influents ambassadeurs, en la portant jusqu’au firmament. Non seulement grâce à son inspiration mais aussi, parfois, à coup de piques contre ses collègues du mouvement. De quoi cristalliser l’attention et maintenir sous les spotlights les figures qui incarnent cette musique.
Nostalgique de cette époque, Debordo Leekunfa a eu une pensée émue pour son alter-ego le mardi 6 août 2024, en écrivant : «Je t’aime bro, je n’arrive pas à m’en remettre.»
C’est vrai qu’Arafat avait un truc. Il était celui qui donnait le ton, inspirait, narguait ou dérangeait. Mais c’était de bonne guerre. Et depuis que le meneur naturel du game est parti, quelque chose s’est brisée.
Si le Coupé-décalé continue son bonhomme de chemin, il le fait désormais loin de sa tendance sulfureuse qui l’a révélée depuis la génération pionnière des Douk Saga ou encore la joyeuse bande de la Jet Set avec ses flambeurs.
Aujourd'hui, des artistes tels que Kédjévara, Bebi Philip, Serge Beynaud, Debordo Leekunfa, Mix Premier, Safarel Obiang (pour ne citer qu’eux) tiennent la baraque. Mais avec une image plus policée et un style aseptisé. La réalité est que la plupart d’entre eux sont devenus des pères de famille, quand la majorité de leurs fans ont grandi et intégré la vie active.
Il va de soi également que certaines priorités ont changé, pour ces “jeunes adultes” qui veulent communiquer une image saine à leurs progénitures. En somme, le Coupé-décalé n’est pas mort. Comme toute discipline du vaste domaine des arts vivants, il doit évoluer et se réinventer. C’est à ce prix, sans doute, qu’il obtiendra son salut.
François Yéo
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