Musique : C'est quoi la Kora du ‘’roi’’ Toumani Diabaté?

Le musicien malien Toumani Diabaté est décédé le 19 juillet 2024 à Bamako, la capitale malienne, où il était né 58 ans plutôt. Considéré comme l'un des plus grands joueurs de kora, il héritera en Afrique de l’Ouest du surnom bien mérité de ‘’roi de la kora’’.

Instrument africain à cordes pincées, la kora est une sorte de luth composée d'un long manche et d'une calebasse tendue d'une peau majoritairement en usage dans la sphère culturelle mandingue. Quoiqu'elle soit à la portée de tous dans le monde moderne, son usage, dans la culture mandingue, relève d’une tradition initiatique séculaire. En d’autres termes, être joueur de kora se transmet de génération en génération. Un korafola (pratiquant de la kora) est un gardien de la musique traditionnelle africaine et assumait dans l’Afrique ancienne les fonctions de conteur, de musicien, de chanteur et aussi dépositaire de la mémoire de la société et des souverains.

Et le regretté Toumani Diabaté appartenait à la soixante-et-onzième génération depuis son ancêtre, Djelimakan Diabaté, qui aurait reçu la kora originelle de façon magique selon la légende. Mysticisme et l’histoire se croisent alors pour donner une dimension extraordinaire à l’usage de la kora.

Entre un koriste et son instrument, il n’y a pas seulement un rapport artistique. Les deux entités vivent des liens fusionnels. L’un, l’instrument, libérant son inspiration enthousiaste (au sens grec de la présence d’un dieu agissant), le transmet dans une sorte de transe mystique à son maitre. L’autre, le koriste, s’en saisit et, de ses doigts comme possédés, fait surgir de l’instrument des notes envoûtantes, son génie créateur qu’aucune école de musique ne saurait expliquer.

Un pan de la légende de Soundjata, le fondateur de l’empire du Mali au Moyen-äge, enseigne que c’est l’un des premiers griots du Mali, Balla Fasséké, usant de son talent de maître de la kora, séduisit le farouche roi Soumaoro Kanté en sortant des notes sublimes du balafon sacré du terrifiant conquérant.

C’est avec cet instrument mystère que Toumani Diabaté subjuguera le monde à travers de nombreuses distinctions dont deux Grammy Awards, l’un le 8 février 2006 relativement à son album ‘’In the Heart of the Moon’’ ; le second le 13 février 2011, avec Ali Farka Touré lors de la 53e cérémonie des Grammy Awards, à Los Angeles aux États-Unis, pour leur album ‘’Ali and Toumani’’.

L’héritage du roi est sur la voie d’une perpétuation certaine car son fils, Sidiki Diabaté, surnommé ‘’Prince de la kora’’, est aujourd’hui à la croisée des chemins entre deux mondes: celui de la musique traditionnelle dans laquelle il a été bercé depuis son enfance et celui de la musique moderne qui l’entoure. Cette double postulation artistique donnera à sa mission de korafola une dimension d’universalité.

Diaman Emmanuel